Communiqué de membres de la Communauté de l'IP en réponse à l'article du Quotidien des Pharmaciens du 20 avril 2023 intitulé "Pénurie de personnel : et si c’était générationnel ?".

Suite à la lecture de cet article, nous, membres de la CIP pharmacien·nes thésé·es (pour certain·es depuis longtemps), non thésé·es, étudiant·es, préparateurices et apprenti·es - ayant travaillé dans de nombreuses officines en CDI, CDD, remplacements, contrats d'intérim', étudiants ou d'apprentissage - souhaitons partager nos expériences vécues dans le monde du travail officinal. En effet, nos témoignages multiples mettent en lumière des éléments qui nous semblent trop souvent passés sous silence par les personnes à qui la parole est donnée par les médias professionnels sur la crise que traverse notre milieu.

L'économie de l'officine est pilotée depuis des décennies par les syndicats des pharmaciens qui, rappelons le, sont ceux des titulaires. Nous remarquons, avec une certaine ironie, que ces mêmes syndicats s'interrogent sur les raisons de cette crise et de ses conséquences en ayant la bonne idée, dans leur entre-soi habituel, de questionner... Les titulaires, et non les salarié·es des officines. La CPNEFP a (enfin) lancé une enquête sur le sujet... Mais combien de salarié·es en ont été informé·es ? En parallèle, l'Ordre a créé une commission "nouveaux inscrits" : un·e représentant·e par filière, ayant moins de 3 ans d'exercice. Nous attendons avec circonspection de voir ce qui émergera de cette initiative, quand la voix des nouvelleaux de toute une filière repose sur une unique personne.

De fait, lorsque les syndicats de titulaires disent :

"Les salaires sont assez élevés" : FAUX ! Ils sont extrêmement disparates, stagnent sur la 2e moitié de carrière et ne suivent pas l'inflation. Lorsqu'ils sont élevés, c'est uniquement grâce à la conjoncture récente qui a inversé le rapport de force en faveur des salarié·es. Notons que la dernière revalorisation de 3%, présentée comme un cadeau par les titulaires, couvrait tout juste l'inflation de l'époque, inflation qui n'a pas cessé depuis. L'échec récent des dernières négociations illustre, là encore, l'absence d'une prise de conscience des titulaires.

"Il y a bien plus pénible comme conditions de travail" : VRAI. Il y a toujours pire. Les syndicats souhaitent donc niveler les conditions de travail par le bas ?

Rappelons des sources de pénibilité des métiers de l'officine :

"Nos nouvelles missions sont attrayantes" : VRAI, mais nous sommes nombreux·ses à souhaiter d'abord à ce que le cœur de l'exercice officinal - DISPENSER des médicaments - s'effectue pleinement et correctement (cf. les bonnes pratiques de dispensation). Il n'est pas tolérable de se retrouver, contraint·es et forcé·es, à pousser toujours plus de boîtes, à vendre des produits toujours plus inutiles et ce toujours plus vite.

"Les horaires sont contraignants" : VRAI ! Ne serait-il pas temps de se pencher sérieusement sur cette question ? La pharmacie française a voulu concurrencer les grandes surfaces (horaires à rallonge, en continu, 24/24...) et est en train de le payer. Doit-on à tout prix former et recruter plus de salarié·es (voire en priver d'autres pays) pour couvrir ces horaires ou ne peut-on pas se recentrer sur une santé de qualité, en adéquation avec les enjeux climatiques, en se permettant de faire mieux avec moins ?

"Le télétravail n'est pas possible" : FAUX ! Il est nécessaire d'inventer d'autres façons de travailler. Le traitement des rejets, le contrôle d'ordonnances a posteriori, les formations de plus en plus souvent réalisées en distanciel, l'étape de recueil des informations d'un entretien pharmaceutique ou d'un bilan de médication, la rédaction de procédures qualité... sont d'autant de tâches réalisables en télétravail.